Avocat Collectivités Territoriales Grenoble et Gap

Basé à GRENOBLE et à GAP, le cabinet PY CONSEIL intervient en droit des collectivités territoriales, principalement dans les départements suivants : Isère, Hautes-Alpes, Drôme, Savoie et Haute-Savoie, Alpes-de-Haute-Provence.

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Contrats publics: l’intérêt lésé en référé précontractuel

Contrats publics, marchés publics : Dans un arrêt du Conseil d’Etat Commune de Haumont, du 27 novembre 2019, n°432996, la haute juridiction juge que :

  • « En vertu des dispositions de l’article L. 551-10 du code de justice administrative, les personnes habilitées à engager le recours prévu à l’article L. 551-1 en cas de manquement du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par le manquement invoqué.
  • Il appartient dès lors au juge du référé précontractuel de rechercher si l’entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l’avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente.
  • La commune d’Hautmont soutenait devant le juge des référés qu’aucun des manquements invoqués par la société Pompes Funèbres de l’Avesnois et la société La Compagnie des crématoriums n’était susceptible de les avoir lésées dès lors qu’elles n’avaient pas fait acte de candidature et que si elles l’avaient fait, leurs candidatures n’auraient pu qu’être écartées, s’agissant de la société Les Pompes Funèbres de l’Avesnois, parce qu’elle ne disposait pas des capacités techniques et financières pour assurer la mise aux normes et l’exploitation du crématorium et, s’agissant de la société La Compagnie des crématoriums, parce qu’elle ne disposait pas de l’habilitation prévue par l’article L. 2223-23 du code général des collectivités territoriales.
  • Le juge des référés a écarté cette argumentation comme inopérante au motif que les sociétés avaient été dissuadées de présenter leur candidature en raison du délai supplémentaire insuffisant laissé aux participants à la consultation pour compléter leur offre à l’issue de la modification apportée par la commune aux conditions de la consultation. En se prononçant ainsi, le juge des référés s’est abstenu de rechercher si, comme le soutenait la commune, les sociétés ne disposaient manifestement pas des capacités techniques et financières suffisantes ou des pièces nécessaires pour constituer un dossier conforme aux exigences du règlement de consultation, et si, de ce fait, les manquements dénoncés n’étaient pas insusceptibles de les avoir lésées. Il a, ce faisant, commis une erreur de droit. Par suite, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, la commune d’Hautmont est fondée à demander l’annulation de l’ordonnance qu’elle attaque. »

Ainsi, il est rappelé qu’en matière de contrats marchés publics, le juge du référé doit rechercher si l’entreprise qui le saisit se prévaut de manquements susceptibles de l’avoir lésée ou qui risquent de la léser.

Le caractère incomplet du dossier de candidature ne peut être opposé au candidat évincé lorsque le pouvoir adjudicateur, en matière de contrats et marchés publics, n’a pas rejeté sa candidature ni sollicité une régularisation.

Mais ici les requérants n’avaient pas présenté de candidature. Ils pouvaient donc seulement se prévaloir d’un intérêt lésé ou susceptible de l’être en raison du manquement reproché au pouvoir adjudicateur.

Et ce dernier pouvait opposer un motif de rejet de candidature ou d’offre. Or précisément, les requérants ne disposaient pas des capacités techniques et financières suffisantes ou des pièces nécessaires pour déposer un dossier régulier.

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Me PY intervient régulièrement en contrats et marchés publics : https://www.py-avocat.fr/marches-publics-grenoble/ ; https://www.linkedin.com/in/aurélien-py-41502586/

N’hésitez pas à vous rapprocher de lui pour toute procédure de référé précontractuel, référé contractuel, REP contre la décision de rejet de votre offre ou pour un recours dit Tarn-et-Garonne en appréciation de la validité du contrat (annulation et demande indemnitaire).

 

 

Marchés publics: sanction de l’autoévaluation des candidats

Contrats –  Marchés publics – Méthode de notation des offres.

Par un arrêt du 22 novembre 2019 (n°418460), le Conseil d’État juge qu’en matière de marchés publics, un acheteur ne peut laisser les candidats s’autoévaluer, ne serait-ce que pour un sous-critère de sélection, en méconnaissance des principes d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures.

En l’espèce, dans le cadre d’un marché de service de transport public, l’acheteur avait retenu trois critères de sélection des offres : le prix, la valeur technique et les garanties environnementales.

Les candidats au marché public devaient s’auto-attribuer une « note de qualité », sous le critère de la valeur technique.

L’acheteur justifiait un tel choix par la mise en place d’une sanction en cas de non-respect de son engagement pour le candidat sélectionné.

Pour le Conseil d’État, le respect des principes essentiels ne serait pas garanti dans la mesure où le contrôle n’interviendrait qu’a posteriori de la conclusion du marché public.

Les critères de notation doivent être contrôlés lors de la phase d’analyse de l’offre. 

« 2. Le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en oeuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a retenus et rendus publics. Toutefois, une méthode de notation est entachée d’irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, elle est, par elle-même, de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et est, de ce fait, susceptible de conduire, pour la mise en oeuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l’ensemble des critères pondérés, à ce que l’offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. Il en va ainsi alors même que le pouvoir adjudicateur, qui n’y est pas tenu, aurait rendu publique, dans l’avis d’appel à concurrence ou les documents de la consultation, une telle méthode de notation.       

3. Une méthode de notation des offres par laquelle le pouvoir adjudicateur laisse aux candidats le soin de fixer, pour l’un des critères ou sous-critères, la note qu’ils estiment devoir leur être attribuée est, par elle-même, de nature à priver de portée utile le critère ou sous-critère en cause si cette note ne peut donner lieu à vérification au stade de l’analyse des offres, quand bien même les documents de la consultation prévoiraient que le candidat attributaire qui ne respecterait pas, lors de l’exécution du marché, les engagements que cette note entend traduire pourrait, de ce fait, se voir infliger des pénalités.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le département de l’Isère a retenu trois critères de jugement des offres, à savoir le prix, la valeur technique et les garanties environnementales, pondérés respectivement à 60 %, 25 % et 15 %. La notation de l’un des deux sous-critères de la valeur technique, intitulé  » niveau d’engagement du candidat en matière de notation de la qualité du service rendu sur les lignes objet du marché « , pondéré à hauteur de 20 %, dépendait exclusivement du niveau de qualité du service que le candidat s’estimait en mesure de garantir et ne résultait que de l’indication par le candidat lui-même d’une note dite  » note qualité  » qu’il devait s’attribuer à l’aide d’un outil de simulation. Les éléments mentionnés pour l’auto-évaluation, portant sur la propreté du véhicule,  » l’ambiance générale  » au sein du véhicule, la ponctualité, la conduite respectueuse du code de la route ou la qualité de l’accueil à bord du véhicule ne pouvaient faire l’objet d’une évaluation objective au stade de l’analyse des offres. La  » note qualité  » devait être comprise entre 7 et 9 sur 10 et la notation de ce sous-critère pouvait donc aller de 0, pour le candidat s’attribuant une  » note qualité  » de 7, à 25 points, pour le candidat s’attribuant une  » note qualité  » de 9. La cour administrative d’appel de Lyon a estimé que, par le recours à une telle méthode de notation, le département de l’Isère n’avait pas renoncé à apprécier la valeur des offres au motif, d’une part, qu’il avait précisément défini et communiqué aux candidats les modalités selon lesquelles le sous-critère en litige serait apprécié et, d’autre part, que la note attribuée aux candidats avait vocation à servir de référence pour la détermination de leur note annuelle  » qualité  » et le calcul d’éventuelles pénalités en cas de manquement à cet engagement. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 qu’en statuant ainsi, la cour administrative d’appel de Lyon a commis une erreur de droit. Il suit de là que la société Autocars Faure est fondée, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque ».

Ainsi, un candidat évincé d’un marché public peut se prévaloir de cette irrégularité pour demander l’annulation de celui-ci et l’indemnisation des préjudices résultant de son éviction.

Lire l’arrêt : CE, 22 novembre 2019, n°418460 : https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000039417333

 

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